Opérateur pseudo-différentiel

En analyse mathématique, un opérateur pseudo-différentiel est une extension du concept familier d'opérateur différentiel, permettant notamment l'inclusion d'ordres de dérivation non entiers. Ces opérateurs pseudo-différentiels sont abondamment utilisés dans la théorie des équations aux dérivées partielles et en théorie quantique des champs.

Rappels et notations modifier

On reprend ci-dessous les notations introduites dans l'article opérateur différentiel.

Opérateur différentiel modifier

Rappelons qu'un opérateur différentiel linéaire d'ordre   s'écrit :

 

où les  , appelées coefficients de l'opérateur  , sont des fonctions des   variables d'espace  .

Introduction de la transformée de Fourier modifier

Définition modifier

On définit ici la transformée de Fourier de la fonction   de   variables par :

 .

La formule de transformation inverse s'écrit alors :

 .

Application aux opérateurs différentiels modifier

Le symbole de l'opérateur différentiel   d'ordre   est la fonction   des   variables   polynomiale en   :

 .

L'opérateur différentiel   linéaire d'ordre   vérifie alors la relation :

 .

On constate que cette formule pourrait en fait permettre de définir l'opérateur   à partir de son symbole  . Nous allons mettre cette idée à profit dans le paragraphe suivant.

Introduction : opérateur pseudo-différentiel à coefficients constants modifier

Opérateur différentiel à coefficients constants modifier

Si les coefficients   de l'opérateur différentiel   d'ordre   sont indépendants des   variables d'espace  , son symbole est seulement une fonction   des   variables   polynomiale en   :

 

de telle sorte que :

 

soit encore, en utilisant la transformation de Fourier inverse[1] :

 .

Définition : opérateur pseudo-différentiel à coefficients constants modifier

Soit une fonction   des   variables  . On associe à cette fonction un opérateur pseudo-différentiel   à coefficients constants, dont l'action sur une fonction   est définie par l'intégrale suivante :

 .

Pour que l'intégrale ait un sens, il faut que le symbole   présente quelques « bonnes » propriétés :

  • la fonction   doit être lisse ;
  • la fonction   doit avoir une croissance tempérée lorsque  , cette croissance tempérée devant de plus s'améliorer par dérivation. Par analogie avec le cas d'un opérateur différentiel d'ordre  , où cette croissance est polynomiale, on est amené à demander ici qu'il existe un nombre   tel que :
 

où les   sont des constantes, qui peuvent dépendre de  .

Calcul symbolique exact modifier

Soient   et   deux opérateurs pseudo-différentiels à coefficients constants, définis respectivement par les symboles   et  . Alors, l'opérateur   est encore un opérateur pseudo-différentiel à coefficients constants, dont le symbole est le produit  .

Opérateur pseudo-différentiel : cas général modifier

Définition modifier

Soit une fonction   des   variables  . On associe à cette fonction un opérateur pseudo-différentiel  , dont l'action sur une fonction   est définie par l'intégrale suivante :

 .

Remarque : on note parfois cet opérateur pseudo-différentiel à partir de son symbole de la façon suivante :  . Il existe une autre définition, celle de Weyl:

 .

On trouvera plus de détails dans le livre [2] et dans la pageAndré Unterberger.

Propriétés requises du symbole modifier

Pour que l'intégrale ait un sens, il faut que le symbole   présente quelques « bonnes » propriétés, énoncées ci-dessous :

  • la fonction   doit avoir une croissance tempérée lorsque  , cette croissance tempérée devant de plus s'améliorer par dérivation. Par analogie avec le cas d'un opérateur différentiel d'ordre  , où cette croissance est polynomiale, on est amené à demander ici qu'il existe un nombre   tel que
     
    où les   sont des constantes, qui peuvent dépendre de   ;
  • la fonction   doit avoir une variation lente dans les variables d'espace  . On demande explicitement que
     .

Ces deux conditions peuvent être combinées en une seule, utilisée ci-dessous pour définir plus précisément la classe des symboles d'ordre  .

Classe des symboles d'ordre m modifier

Soit   un compact, et   une fonction lisse de  . Soit   un nombre réel quelconque. La classe   des symboles d'ordre   est définie par :

 

pour tout  ,  , et pour tous les multi-indices  . Les   sont des constantes, qui peuvent dépendre de   et  .

Remarque : lorsque la mention du compact   est indifférente, on note simplement :  .

On note souvent   l'ensemble des opérateurs pseudo-différentiels à symbole dans  

Propriété de pseudo-localité modifier

Support singulier d'une distribution modifier

On appelle support singulier d'une distribution   le complémentaire de l'ensemble des points au voisinage desquels   est une fonction  .

Calcul symbolique modifier

Soient   des éléments de  . Alors l'opérateur   est aussi un opérateur pseudo-différentiel, dont le symbole, qui appartient à   est donné par une somme asymptotique dont le premier terme est  

Continuité dans les espaces de Sobolev modifier

On note   l'espace de Sobolev standard d'ordre   sur  . Soient   et   deux nombres réels. Un opérateur pseudo-différentiel d'ordre   sur   (c.-à-d. un élément de  ) est continu de   dans  .

Propriété de pseudo-localité modifier

Soit   et soit   le noyau de  . Alors   est   pour  . En particulier, pour toute distribution tempérée  , supp sing   supp sing  .

Bibliothèque virtuelle modifier

(en) M. S. Joshi, Lectures on Pseudo-differential Operators, cours disponible sur arXiv.

Bibliographie modifier

  • Serge Alinhac et Patrick Gérard, Opérateurs pseudo-différentiels et théorème de Nash-Moser, coll. « Savoirs actuels », EDP Sciences/CNRS éditions, 1991 (ISBN 2-86883-363-2). Issu d’un cours professé à l’École normale supérieure dans le cadre du magistère de mathématiques, ce livre s’adresse aux étudiants de troisième cycle de mathématiques désireux d’acquérir une formation de base en analyse.
  • Jacques Chazarain et Alain Piriou, Introduction à la théorie des équations aux dérivées partielles linéaires, Gauthier-Villars, 1981 (ISBN 2-04-012157-9).
  • (en) Yu. V. Egorov et M. A. Shubin (en), Elements of the Modern Theory of Partial Differential Equations, Springer-Verlag, 2e éd., 1999 (ISBN 3-540-65377-5). Cet ouvrage fait suite au volume d'introduction : Foundations of the Classical Theory of Partial Differential Equations, Springer-Verlag, 2e éd., 1998 (ISBN 3-540-63825-3).
  • (en) Lars Hörmander, The Analysis of Linear Partial Differential Operators, Springer-Verlag, 1983-1985. Traité de référence en quatre volumes, par le récipiendaire de la médaille Fields 1962. Le volume III est sous-titré : Pseudo-Differential Operators, et le volume IV : Fourier Integral Operators.
  • (en) Lars Hörmander, Linear Partial Differential Operators, Springer-Verlag, 1963. Ce livre contient les travaux pour lesquels l'auteur a obtenu la médaille Fields en 1962.
  • (en) Nicolas Lerner, Metrics on the phase space and non-selfadjoint pseudo-differential operators, Pseudo-Differential Operators. Theory and Applications, 3. Birkhäuser Verlag, Basel, 2010.
  • (en) M. A. Shubin, Pseudodifferential Operators and Spectral Theory, Springer-Verlag, 2001 (ISBN 3-540-41195-X).
  • (en) Michael E. Taylor (en), Pseudodifferential Operators, Princeton Univ. Press, 1981 (ISBN 0-691-08282-0).
  • (en) Michael E. Taylor, Partial Differential Equations II - Qualitative Studies of Linear Equations, coll. « Applied Mathematical Sciences » (no 116), Springer-Verlag, 2e éd., 1997 (ISBN 0-387-94651-9). Cet ouvrage fait suite au volume d'introduction : Partial Differential Equations - Basic Theory, coll. « Texts in Applied Mathematics » (no 23), Springer-Verlag, 2e éd., 1999 (ISBN 0-387-94654-3).
  • (en) Michael E. Taylor, Partial Differential Equations III - Nonlinear Equations, coll. « Applied Mathematical Sciences » (no 117), Springer-Verlag, 2e éd., 1997 (ISBN 0-387-94652-7).
  • (en) François Treves, Introduction to Pseudo Differential and Fourier Integral Operators, coll. « University Series in Mathematics », Plenum Publ., 1981 (ISBN 0-306-40404-4).
  • (en) André Unterberger, Pseudo-differential operators and applications: an introduction, Lecture Notes Series, 46. Aarhus Universitet, Matematisk Institut, Aarhus, 1976.

Note modifier

  1. Cette formule est fausse lorsque les coefficients de l'opérateur différentiel ne sont pas constants.
  2. Nicolas Lerner, Metrics on the phase space and non-selfadjoint pseudo-differential operators, Pseudo-Differential Operators. Theory and Applications, 3. Birkhäuser Verlag, Basel, 2010