Grande Assemblée nationale de Turquie

parlement monocaméral de la Turquie

La Grande Assemblée nationale de Turquie (en turc : Türkiye Büyük Millet Meclisi abrégé TBMM) est le parlement monocaméral de la république de Turquie, composé de 600 députés.

Grande Assemblée nationale
de Turquie
(tr) Türkiye Büyük Millet Meclisi

28e législature

Description de cette image, également commentée ci-après
Sceau de la Grande Assemblée nationale
Présentation
Type Monocaméral
Création
Lieu Ankara
Durée du mandat 5 ans
Présidence
Président Numan Kurtulmuş (AKP)
Élection
1re vice-président Bekir Bozdağ (AKP)
2e vice-président Gülizar Biçer Karaca (CHP)
3e vice-président Sırrı Süreyya Önder (DEM)
4e vice-président Celal Adan (MHP)
Structure
Membres 600 députés
Description de cette image, également commentée ci-après
Composition actuelle.
Groupes politiques

Gouvernement (265)

Soutien sans participation (55)

Opposition (274)

Vacants (6)

  • Vacants (6)
Élection
Système électoral Proportionnel D'Hondt
Dernier scrutin 14 mai 2023

Siège de la Grande Assemblée nationale

Description de cette image, également commentée ci-après
Photographie du lieu de réunion.

Divers
Site web tbmm.gov.tr
Voir aussi Politique en Turquie

Dans le système constitutionnel turc, la Grande Assemblée nationale détient le pouvoir législatif. Son président est Numan Kurtulmuş (AKP) depuis le .

Élection

modifier

La Grande Assemblée nationale est composée de 600 députés élus pour cinq ans au scrutin proportionnel plurinominal à listes bloquées, répartis selon la méthode D'Hondt avec un seuil électoral de 7 %.

Le scrutin a lieu dans 87 circonscriptions plurinominales correspondant pour la plupart aux 81 provinces du pays. L'attribution du nombre de sièges par province se fait sur la base de leur population. Celles qui se voient attribuées entre 19 et 36 sièges en raison de leur importance démographique sont divisées en deux circonscriptions, et celles qui en obtiennent plus de 36 sont divisées en trois. En 2023, les villes de Bursa et d'Izmir sont par conséquent divisés en deux et Istanbul et Ankara en trois[1],[2].

Au seuil électoral s'ajoutent plusieurs conditions supplémentaires auxquelles un parti doit se soumettre pour pouvoir bénéficier de sièges. Ils doivent avoir une présence dans un minimum d'un tiers des districts d'au moins 40 provinces, dans lesquelles ils doivent présenter au moins deux candidats.

Depuis la modification constitutionnelle de 2017, la possibilité d'alliances préélectorales entre deux partis ou plus a été rendue possible. Dans l'hypothèse où une partie seulement des membres d'une alliance parvient à franchir le seuil de 10 %, les partis ayant échoué à l'obtenir se voiient tout de même attribuer des sièges[1]. Enfin, dans le cas des alliances, les électeurs ont le choix de voter pour un ou l'intégralité des partis, représentés sur le même bulletin, où il convient de cocher[1]. Les suffrages concernant une alliance sont partagés proportionnellement par les partis, suivant les scores obtenus par chacun d'eux[1]. Les candidats indépendants doivent simplement franchir le quotient électoral dans leur circonscription.

Seuil électoral

modifier

De 1982 à 2022, le seuil électoral était de 10 %[3]. Ce seuil très élevé, introduit par la junte militaire à la suite du coup d'État de 1980, était régulièrement critiqué par l'opposition qui militait pour son abaissement[4].

Le seuil de 10 % avait par le passé poussé au regroupement des formations et au vote tactique de la part des électeurs afin d'éviter que leur vote ne soit « perdu ». Lors des législatives de 2002, notamment, l'émiettement des voix amène à l'élimination de tous les partis sauf deux, l'AKP et le CHP se partageant la totalité des sièges tout en ayant recueilli respectivement 34 % et 19 % des voix. À l'inverse, au cours des législatives de juin 2015, le HDP aurait reçu de nombreuses voix en dehors de son socle électoral kurde de la part d'électeurs de l'opposition souhaitant éviter son élimination qui aurait entraîner une répartition des sièges au profit de l'AKP.

Fonctions et pouvoirs

modifier

« Le pouvoir législatif appartient à la Grande Assemblée nationale de Turquie au nom de la nation turque. Ce pouvoir ne peut pas être délégué.
— Article 7 de la Constitution turque de 1982[5] »

La Grande Assemblée nationale :

  • vote la loi ;
  • contrôle les actions du conseil des ministres ;
  • accorde le pouvoir au conseil des ministres de faire des décrets-lois ;
  • approuve le budget ;
  • autorise l'émission de monnaie ;
  • déclare la guerre ;
  • confirme la ratification des traités internationaux ;
  • proclame, avec l'accord des trois cinquièmes de ses membres, l'amnistie ;
  • exerce les autres pouvoirs qui lui sont attribués par la Constitution[6].

En matière constitutionnelle, la Grande Assemblée nationale de Turquie est également compétente pour :

  • Nommer trois des quinze membres de la Cour constitutionnelle[7] ;
  • Adopter, avec l'accord des trois cinquièmes au moins de ses membres, des amendements constitutionnels[8].

Le règlement intérieur de la Grande Assemblée nationale doit être approuvé par la Cour constitutionnelle[9].

Histoire

modifier

De l'institution

modifier

Le CHP, parti unique

modifier

La Grande Assemblée nationale de Turquie est constituée le , à la suite des élections organisées par Mustafa Kemal Atatürk. Ce dernier en devient alors président à l'unanimité. Le suivant, un comité exécutif est élu, qui déclare que le nouveau parlement est le gouvernement légal et provisoire du pays.

Les premières élections se tiennent le , seul le Parti républicain du peuple (CHP) de Mustafa Kemal étant alors autorisé. Les élections se tiennent alors tous les quatre ans et voient le nombre de parlementaires augmenter régulièrement, de 333 en 1923 à 492 vingt ans plus tard.

Le droit de vote aux élections nationales est accordé aux femmes en 1934. Elles votent pour la première fois lors du scrutin législatif de 1935, à l'issue duquel 18 députées sont élues (4,6 % des parlementaires)[10].

Mise en place du multipartisme

modifier

À la suite de la Seconde Guerre mondiale, le multipartisme est autorisé, mais les élections du consacre la domination du CHP avec un score de 61 %. Toutefois, le scrutin suivant, tenu le , voit la victoire du Parti démocrate (DP), qui remporte 53,3 % des suffrages exprimés.

La Constitution de 1961

modifier

Avec le coup d'État militaire du 27 mai 1960, l'activité parlementaire est suspendue, le DP est dissous et le pouvoir concentré dans les mains du comité pour l'unité nationale (MBK).

Le MBK établit une nouvelle Constitution, la troisième depuis l'indépendance, qui fait de la Grande Assemblée nationale le Parlement bicaméral de la République, composé d'une Assemblée nationale de 450 députés élus pour quatre ans et d'un Sénat de la République de 150 sénateurs élus pour six ans et renouvelés d'un tiers tous les deux ans, les membres du MBK et les anciens présidents y siégeant de droit.

Entre 1965 et 1973, le Parti de la justice (AP) de Süleyman Demirel contrôle la majorité absolue à la chambre basse. À la suite du coup d'État du 12 septembre 1980, l'activité parlementaire est à nouveau suspendue et le pouvoir législatif revient au Conseil de sécurité nationale (MGK).

La Constitution de 1982

modifier

La Constitution de 1982 rétablit le monocamérisme du Parlement, qui garde le nom de Grande Assemblée nationale de Turquie. Le nombre de députés, initialement fixé à 400, est augmenté à 450 en 1987, puis 550 en 1995. Bien que la durée de la législature soit fixée à cinq ans, jamais une élection ne s'est tenue à terme, le scrutin de 2007 étant celui clôturant la plus longue législature depuis le coup d'État.

Entre 1983 et 1991, le Parti de la mère patrie (ANAP) gouverne avec une majorité absolue. S'ensuivent onze ans de changements de majorité, que vient clore la victoire, en 2002, du Parti de la justice et du développement (AKP). Ce dernier confirme sa majorité absolue aux deux élections suivantes, 2007 et 2011, ce qui constitue la plus importante domination parlementaire d'un parti en Turquie depuis l'introduction du multipartisme.

Par la révision constitutionnelle du , la durée du mandat législatif a été ramenée à quatre ans.

Révision constitutionnelle de 2017

modifier

La révision constitutionnelle de 2017, critiquée par ses opposants comme une présidentialisation du régime mettant en danger la séparation des pouvoirs législatif et exécutif, rétablit la durée de la législature à cinq ans et accroît le nombre de députés à 600. Elle supprime le poste de Premier ministre et permet à l'Assemblée de renverser le président de la République, au prix du déclenchement d'élections législatives anticipées.

Du bâtiment

modifier

L'édifice abritant la première Assemblée nationale fut construit en 1923 par l’architecte turc Vedat Tek (en). C’était à l’origine le bâtiment du parti unique, le Parti républicain du peuple (CHP), qui est transformé pour accueillir l’Assemblée.

Les locaux devenant au fil du temps de plus en plus petits, d’énormes travaux d'agrandissement sont entrepris et débouchent sur la construction d’un nouvel édifice. C'est dans ce nouvel édifice, ouvert le , qu'ont été réalisées les grandes réformes de la République turque sous la direction d'Atatürk.

 
Façade avant actuelle de la Grande Assemblée.

Les députés turcs poursuivent leur travail dans cette assemblée pendant 36 ans, du au . En 1961, l’Assemblée emménagea dans de nouveaux locaux et l’ancien immeuble est assigné à l’Organisation du traité central (CENTO). Après la dissolution de cette organisation, les deux bâtiments passent sous le contrôle du ministère de la Culture, qui les transforme quelques années plus tard en musée.

Le bâtiment est dévasté par des bombardements de F-16 de l'armée turque lors de la tentative de coup d'État de juillet 2016[11],[12].

Fonctions

modifier

Les pouvoirs de l'assemblée

modifier

Le président

modifier

Élu pour un mandat de trois ans en début de législature, deux ans en fin de législature par ses pairs, le président de la Grande Assemblée nationale de Turquie dispose, dans ses fonctions de plusieurs prérogatives :

  • il préside les séances ;
  • il contrôle le budget et les dépenses parlementaires ;
  • il contresigne les lois votées en séance et signées par le président de la République ;
  • il a une capacité de contrôle sur le travail des députés.

Par ailleurs, le président de la Grande Assemblée est le troisième personnage de l'État du pays dans l'ordre protocolaire. Jusqu'en 2018, en cas de décès, de démission ou de tout empêchement du président de la République d'assumer ses fonctions, le président de la Grande assemblée devient de ce fait président de la République par intérim et doit convoquer une nouvelle élection présidentielle.

Groupes parlementaires

modifier

Les groupes parlementaires (composés au minimum de 20 membres[13]) de la 28e législature se répartissent comme suit :

Groupes[14]
Parti Idéologie Sièges Président de groupe
Parti de la justice et du développement
Adalet ve Kalkınma Partisi
Droite à extrême droite
Nationalisme, démocratie islamique, conservatisme social, libéralisme économique
263  /  600
Abdullah Güler
Parti républicain du peuple
Cumhuriyet Halk Partisi
Centre-gauche
Social-démocratie, kémalisme, europhilie,
130  /  600
Parti de l’égalité et de la démocratie des peuples
Halkların Eşitlik ve Demokrasi Partisi
Gauche
Socialisme démocratique, populisme de gauche, droits des minorités, écologie politique
57  /  600
Filiz Kerestecioğlu
Parti d'action nationaliste
Milliyetçi Hareket Partisi
Droite à extrême droite
Ultranationalisme, panturquisme, populisme de droite, euroscepticisme
50  /  600
Erkan Akçay
Le Bon Parti
İyi Parti
Centre, centre droit, à droite
Nationalisme, kémalisme, libéral-conservatisme, laïcisme, europhilie
44  /  600
Parti de la félicité
Saadet Partisi
Droite à extrême droite
Islamisme, nationalisme religieux, Millî Görüş
20  /  600

Notes et références

modifier
  1. a b c et d « IPU PARLINE database: TURQUIE (Türkiye Büyük Millet Meclisi (T.B.M.M)), Texte intégral », sur archive.ipu.org (consulté le ).
  2. « Yüksek Seçim Kurulu Kararları », Official Gazette of the Republic of Turkey, no 31800,‎ (lire en ligne, consulté le )
  3. « En Turquie, le seuil électoral passe de 10 à 7 % », sur lepetitjournal.com (consulté le ).
  4. « Turquie : refus d'abaisser le seuil électoral », sur LEFIGARO, lefigaro, (ISSN 0182-5852, consulté le ).
  5. Article 7 de la Constitution.
  6. Article 87 de la Constitution.
  7. Article 146 de la Constitution.
  8. Article 175 de la Constitution.
  9. Article 148 de la Constitution.
  10. Hazal Atay, « En Turquie, « la politique porte toujours la moustache » », sur Orient XXI, (consulté le ).
  11. « Après la tentative de coup d’État, le Parlement turc dévasté », sur Le Monde, (consulté le ).
  12. « Coups d'État en Turquie : le parlement turc bombardé, les avions F16 attaquent les chars… », sur Alyaexpress-News, (consulté le ).
  13. (tr) « GRAND NATIONAL ASSEMBLY OF TÜRKİYE », sur global.tbmm.gov.tr (consulté le ).
  14. (tr) « Türkiye Büyük Millet Meclisi Milletvekilleri Dağılımı », sur tbmm.gov.tr (consulté le )

Voir aussi

modifier

Sur les autres projets Wikimedia :

Articles connexes

modifier

Liens externes

modifier