La Dernière Séance (émission de télévision)

programme télévisé français

La Dernière Séance est une émission de télévision française essentiellement consacrée aux classiques du cinéma américain et présentée par le chanteur et acteur Eddy Mitchell. La première diffusion a lieu le sur la chaîne nationale publique FR3, future France 3. La direction de la troisième chaîne décide de retirer le programme de sa grille, après la dernière émission diffusée le .

La Dernière Séance
« Le Palace » de Beaumont-sur-Oise qui apparaît dans le générique de l'émission.
« Le Palace » de Beaumont-sur-Oise qui apparaît dans le générique de l'émission.

Genre Émission de cinéma
Réalisation Gérard Jourd'hui
Présentation Eddy Mitchell
Pays France
Nombre d’émissions 192
Production
Lieu de tournage « Le Trianon » de Romainville, « Le Palace » de Beaumont-sur-Oise et le cinéma « Le Voltaire » de La Garenne-Colombes
Production Gérard Jourd'hui
Diffusion
Diffusion France 3
Action (rediffusion)
Ancienne diffusion France Régions 3
Date de première diffusion
Date de dernière diffusion

Coproduite et réalisée par Gérard Jourd'hui, Patrick Brion assurant la partie éditoriale, elle tire son nom de la chanson La Dernière Séance (1978) d'Eddy Mitchell[1] mais aussi du film La Dernière Séance de Peter Bogdanovich[2].

L'émission est rediffusée une fois par mois, depuis sur la chaîne de télévision Action. Elle est réalisée dans les conditions de l'époque dont la séance comprend actualités, publicités et entracte avec toutefois sur cette chaîne de télévision numérique, une copie des films remastérisée en haute définition.

Principe

modifier

À l'été 1979[3],[4], Eddy Mitchell constate que les films américains de la période qu'il apprécie sont peu ou pas diffusés à la télévision ou en salles[5], et déplore la disparition des séances de minuit dans les cinémas[3]. Par l'entremise de son ami Alain Van Gennep[3], directeur des cinémas UGC du 8e arrondissement de Paris et amateur des mêmes films[5], il obtient du président d'UGC l'autorisation d'organiser à l'Ermitage une séance de minuit, après les séances normales. La première séance, qu'il destine d'abord à ses amis, avant de l'ouvrir au public[5], a lieu le [6],[4], et Coluche l'aide à en faire la promotion[4],[3]. Les films programmés lors de cette séance sont Scaramouche et La Blonde et moi[5]. Devant le succès rencontré, l'expérience est renouvelée et finit par arriver aux oreilles de Serge Moati, alors directeur général de FR3, qui propose à Eddy Mitchell de transposer le principe à la télévision[5],[3].

L'émission se présente dans un décor d'un « cinéma de quartier »[1], des figurants accompagnant le présentateur habillé en tenue de l'époque décontractée.

Les films programmés « s'inscrivent dans l'âge d'or des grands studios américains »[7] des années 1930 aux années 1960, tous genres confondus. Serge Moati voulait initialement respecter le quota de films français, mais Eddy Mitchell a refusé[8].

Chaque émission présente un dessin animé puis un premier film, doublé en français, introduit en général depuis le guichet du cinéma par Eddy Mitchell, des actualités cinématographiques d'époque, un second dessin animé, des réclames, puis un film en version originale sous-titrée et enfin les bandes-annonces des films de l'émission suivante.

Les soirées sont parfois thématiques, autour d'un réalisateur, d'un acteur, ou d'un genre cinématographique.

Contexte historique

modifier

Au début des années 1950, le journaliste François Chalais propose le rendez-vous télévisuel À vous de juger. Dans son premier volet, cette émission présente et commente quatre à cinq films venant de sortir au cinéma; le second volet traite un panorama complet de l'actualité du cinéma[9]. En délivrant une certaine critique, l'émission propose toutefois au téléspectateur de faire son choix, en connaissance de cause et pour tous types de cinéma. L'émission est programmée le jeudi mais à cette époque, la télévision n'a pas encore fixé les critères pour fidéliser son public et la programmation de l'émission fluctue au fil des mois et des années soit le jeudi, soit le vendredi et elle peut être parfois déplacée en deuxième partie de soirée après 22h. En octobre 1953, l'émission prend le titre Plaisir du cinéma et François Chalais la coprésente provisoirement avec l'actrice Odette Joyeux pour une année. En novembre 1956, l'émission « Cinéma en liberté » d'une durée d'une heure est proposée chaque jeudi soir après le journal, jusqu'en avril 1957. En octobre 1960, Chalais qui produit aussi le mensuel « Cinépanorama » également le jeudi soir entre février 1956 et décembre 1962, cède sa place à Monique Chapelle[10] qui reprend l'animation d'À vous de juger jusqu'en 1968[11].

Après les événements de mai 1968 et le départ du général de Gaulle président de la République, le 28 avril 1969, l'élection de Georges Pompidou et son nouveau gouvernement réformateur piloté par Jacques Chaban-Delmas, la programmation des deux chaînes nationales publiques de l'ORTF est sensiblement modifiée[12]. La programmation et la promotion des films est significativement revue car l'industrie du cinéma se plaint de la concurrence du petit écran affectant la fréquentation des salles[13]. Jusqu'à la rentrée scolaire de 1972, le jeudi est traditionnellement le jour où les enfants n'ont pas classe[14]; l'après midi et l'avant soirée à la télévision leur est consacrée. Pour les plus grands, la première chaîne propose depuis le milieu des années 1960, une case cinéma en soirée, certains jeudis ainsi que chaque dimanche, à 20h30.

En 1969, l'émission Au Cinéma ce soir intitulée provisoirement « Ce soir... Au cinéma »[15] est lancée à l'antenne sur la Première chaîne de l'ORTF; l'émission se conforme dès 1970, aux titres des autres émissions alternatives de la même case du jeudi : Au Théâtre ce soir et « Au Music-hall ce soir », un rendez-vous conçu par Pierre Sabbagh[16]. Au Cinéma ce soir propose un panorama de l'actualité d'époque choisie par les producteurs ainsi que les principaux films à l'affiche cette année-là, accompagnée d'interviews d'acteurs et de réalisateurs puis un grand film de la même année, dont la notoriété ou la popularité est indiscutable[11] et enfin, un troisième volet permettant d'annoncer le sommaire de la prochaine émission[17].

Lieux de tournage

modifier

Dans le générique de l'émission apparaît la façade du Palace de Beaumont-sur-Oise.

Néanmoins, la plupart des émissions sont tournées au Trianon de Romainville[18]. Ce cinéma a été choisi car il est représentatif des années 1950, ayant été reconstruit à cette époque dans le style « paquebot » et presque inchangé depuis (il est d'ailleurs inscrit aux monuments historiques en 1997[19]), mais aussi pour avoir été fréquenté par Eddy Mitchell dans sa jeunesse[20].

D'autres émissions (dont une spéciale Noël de 1985) sont également tournées au Palace de Beaumont-sur-Oise[21] ainsi qu'au cinéma Le Voltaire de La Garenne-Colombes lequel, bien que classé, est détruit en 2003[22].

Présentateurs

modifier

L'émission est présentée par Eddy Mitchell mais il laisse sa place à d'autres présentateurs pour quelques émissions[23] :

La « séance en relief »

modifier
 
Les lunettes dites « 3D Vidéo » stéréoscopiques fournies par le magazine de télévision partenaire de l'opération.

La Dernière Séance du marque la mémoire de nombreux téléspectateurs. Pour la diffusion du film L'Étrange Créature du lac noir dans le cadre d'une émission spéciale nommée « séance en relief », les téléspectateurs peuvent se procurer des lunettes équipées de filtres bleu et rouge à même de restituer l'effet tridimensionnel stéréoscopique par procédé anaglyphique en achetant un magazine de télévision partenaire de l'opération. Dans son Dictionnaire du cinéma, Jacques Lourcelles précise à propos de cette expérience de relief à la télévision française : « Insuffisamment expliquée, mais parfaitement réussie sur le plan technique, elle déçut le public et n'a pas été renouvelée depuis lors »[26].

L'autre particularité de cette émission est d'être diffusée à la télévision française et à la télévision belge (RTBF). Eddy Mitchell la présente depuis le cinéma Royal Palace de Bruxelles, accompagné de Patrick Brion et Bertrand Tavernier[27]. Ils expliquent leur présence à Bruxelles : « On venait très souvent à Bruxelles car c'était le paradis pour nous »[28].

Programmation

modifier

La Dernière Séance est diffusée sur FR3 le mardi soir de à (sauf pour deux émissions diffusées le vendredi et le lundi ), puis le jeudi soir de à , et enfin le lundi soir de à [29],[30].

  • 1982 : 15 émissions
  • 1983 : 18 émissions
  • 1984 : 15 émissions
  • 1985 : 14 émissions
  • 1986 : 13 émissions
  • 1987 : 9 émissions
  • 1988 : 10 émissions
  • 1989 : 10 émissions
  • 1990 : 10 émissions
  • 1991 : 10 émissions
  • 1992 : 10 émissions
  • 1993 : 10 émissions
  • 1994 : 10 émissions
  • 1995 : 9 émissions
  • 1996 : 11 émissions
  • 1997 : 8 émissions
  • 1998 : 10 émissions

Au cours de ces 192 émissions, 385 films sont diffusés à raison de deux films par émission, à l'exception des émissions du et du , qui ont diffusé trois films chacune, et de l'émission du , qui n'a diffusé qu'un film.

À partir de 1995, 26 films déjà présentés dans l'émission sont rediffusés, ce qui ramène à 359 films différents.

Liste des émissions

modifier

À l'occasion du trentième anniversaire de l’émission, en 2012, le Groupe Figaro a racheté la marque la Dernière Séance[31] et a édité une collection de vingt classiques américains en DVD. Chaque DVD est accompagné d'un livret de seize pages incluant des informations sur le film ainsi que l'histoire de l'émission. Les vingt films sont les suivants[32] :

Références

modifier
  1. a et b « Il prépare sa première séance », Télé Poche,‎ .
  2. Daniel Lesueur, L'argus Eddy Mitchell : Discographie et cotations, Paris, Éditions Alternatives, , 144 p. (ISBN 2-86227-407-0), p. 105.
  3. a b c d et e Eddy Mitchell, Le Dictionnaire de ma vie, Paris, Kero, , 210 p. (ISBN 978-2-36658-403-5), « Dernière séance (la) ».
  4. a b et c « Coluche et Eddy Mitchell », sur Facebook.
  5. a b c d et e Eddy Mitchell dans l'émission de radio 5/7 Boulevard du [présentation].
  6. Alain Magerotte, Heureusement, il y a Eddy ! : Souvenirs et réflexions d'un Fan, Saint-Denis, Édilivre, , 276 p. (ISBN 978-2-332-58045-0), p. 132 [lire en ligne].
  7. Dictionnaire de la télévision française, p. 172.
  8. Samir Ardjoum, « Entretien avec Patrick Brion », sur Il était une fois le cinéma.
  9. Télémagazine, n°19, semaine du 4 octobre 1956, page 9
  10. Télérama, n°560, semaine du 9 octobre 1960, page 32
  11. a et b https://hal.univ-lorraine.fr/tel-01752471 Monique Dilly : « Les magazines de cinéma à la télévision française de 1952 à 2000 : histoire, dispositifs et contenus. Musique, musicologie et arts de la scène ». Université Paul Verlaine - Metz, 2006. NNT:2006METZ004L. tel-01752471
  12. https://www.cairn.info/revue-societes-et-representations-2020-2-page-219.htm Myriam Tsikounas « Pierre Desgraupes et l’audiovisuel avant 1969 », Sociétés & Représentations 2020/2 (N° 50), pages 219 à 235
  13. https://www.cairn.info/le-cinema-exploite--9782020047852-page-86.htm René Bonnell « Le Cinéma exploité : Chapitre IV - Concurrence et contrariété » (1978), Hors collection, Editions du Seuil 1978, pages 86 à 127
  14. https://www.education.gouv.fr/arrete-du-12-mai-1972-determine-l-interruption-des-classes-au-cours-de-la-semaine-scolaire-reportee-10514 « Arrêté du 12 mai 1972 determine l'interruption des classes au cours de la semaine scolaire reportee du jeudi au mercredi ». Ministère de l'éducation nationale.
  15. https://www.youtube.com/watch?v=FlL6TZY2IWs Générique de 1969, INA, sur Youtube.com, consulté le 31 mars 2024
  16. https://books.openedition.org/editionscnrs/2941?lang=fr Évelyne Cohen, Marie-Françoise Lévy, Pascale Goetschel « La télévision des Trente Glorieuses. Les dramatiques télévisées, lieux d’apprentissage culturel et social dans la France des Trente Glorieuses ? Le jeudi voit alterner Au théâtre ce soir, Au cinéma ce soir et Au music-hall ce soir. », Hors collection, CNRS Editions Paris, 2007, 978-2-271-06521-6, 318 pages, papges 113-143
  17. https://www.lemonde.fr/archives/article/1969/06/27/premiere-chaine-retrospective-au-cinema-ce-soir_3059181_1819218.html J.A. : « Première chaîne rétrospective : Au cinéma ce soir » publié le 27 juin 1969, Le Monde.
  18. « Le Trianon », sur cinematrianon.fr, site officiel du Trianon à Romainville (version du sur Internet Archive).
  19. « Cinéma "Le Trianon" », notice no PA93000009, sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture.
  20. « 28 décembre 1998, "La dernière séance" baisse le rideau », INA, .
  21. « Histoire du Beaumont-Palace : Un cinéma-théâtre centenaire », sur beaumontpalace.fr, site officiel du Palace à Beaumont-sur-Oise (version du sur Internet Archive).
  22. « Cinémas garennois », sur La Garenne-Colombes : Le retour du passé, .
  23. Christine Deymard, « En passant par la Lauren », Le Nouvel Observateur, no 1053,‎ , p. 9 (lire en ligne [PDF]).
  24. a et b [vidéo] Extrait de l'émission sur Dailymotion.
  25. « De nombreuses cordes à son arc », sur le site officiel de Michel Sardou.
  26. Dictionnaire du cinéma, p. 1625.
  27. « Eddy Mitchell en lunettes 3D » [vidéo], sur ina.fr.
  28. [vidéo] « Disponible », sur YouTube.
  29. Pascal Caseau, « La Dernière Séance », sur Mitchell-city, (consulté le ).
  30. « La Dernière Séance : Programmation », sur DVDclassik, (consulté le ).
  31. David Medioni, « TV Mag et Le Figaro s'offrent une dernière séance », sur CB News, (version du sur Internet Archive).
  32. Olivier Delcroix, « Les vingt chefs-d'œuvre de Monsieur Eddy », Le Figaro, .

Annexes

modifier

Article connexe

modifier

Liens externes

modifier