Jiahu
Jiahu est un site archéologique situé dans le xian de Wuyang, dans la province du Henan, en Chine, à proximité du fleuve Jaune et à l'est du mont Funiu. Il a été occupé à l'aube du Néolithique pendant environ 1 300 ans. Les occupants du site montrent pendant l'essentiel de la période une activité de chasseurs-cueilleurs plus ou moins sédentarisés, avec l'apparition des premières ressources agricoles significatives en fin de période.
Jiahu | |
Pointes de flèches en os. Site de Jiahu Musée provincial du Henan, Zhengzhou | |
Localisation | |
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Pays | Chine |
Province | Henan |
Xian | Wuyang |
Coordonnées | 33° 36′ 47″ nord, 113° 40′ 01″ est |
Superficie | 5,5 ha |
Histoire | |
Culture | Culture de Peiligang |
Occupation | 7000 - |
Découverte | 1962 |
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Jiahu a livré des écailles de tortue portant des signes gravés, que certains archéologues chinois ont interprété comme une forme primitive d'écriture[1],[2]. Les flutes en os trouvées sur le site illustrent la diffusion de la musique en Chine dès l'Holocène.
Les plus vieilles traces de soie de la préhistoire, qui dateraient de plus de 8 500 ans ont été trouvées en décembre 2016 par une équipe chinoise dans des tombes du site de Jiahu
Situation
modifierJiahu est situé dans le xian de Wuyang, sur le lit majeur de la rivière Sha au nord, et de la rivière Ni au sud.
Historique
modifierMis au jour en 1962, le site n'accueille des fouilles intensives qu'à partir des années 1980.
Chronologie
modifierOccupé au tout début du VIIe millénaire av. J.-C., ce site est considéré comme l'un des premiers villages de la culture de Peiligang. Vers , Jiahu est le théâtre d'inondations et est abandonné.
Habitat
modifierLe site était entouré d'un fossé et couvrait une superficie d'environ 5,5 hectares. Ce « village sédentaire organisé et établi sur une longue durée » a abrité au moins 250 personnes simultanément[2].
Le site a révélé 45 maisons, de nombreuses fosses de stockage, quelques fours et des cimetières. Les installations nouvelles étaient construites sur les anciens emplacements. Les maisons, leurs silos enterrés et leurs cimetières constituent des zones de regroupement qui témoignent d'une grande constance dans l'organisation spatiale. La majorité des habitations ne dépassent guère les 10 m2, voire moins. Elles sont la plupart du temps rondes et semi-enterrées. Leur sol comporte d'épaisses couches de dépôts : tessons, outils usagés et restes de faune et de flore. L'interprétation de ces restes semble montrer une population qui continue de pratiquer d'anciennes coutumes de vie itinérante tout en donnant des signes d'une adaptation partielle à la vie sédentaire[3].
Mode de subsistance
modifierLes pratiques de chasse-pêche et cueillette ont longtemps prévalu, avant que la production agricole se développe vers la fin des 1 300 ans pendant lesquels ce lieu a été occupé[4].
De nombreux vestiges de bovins, de cerfs et d'ovins sauvages semblent indiquer l'existence de nombreuses espèces disponibles pour la chasse. Les restes d'animaux aquatiques, poissons, alligators, moules d'eau douce, montrent la richesse des cours d'eau et des marais[5]. La flore était tout aussi riche : glands, noix, noisettes, jujube, prunes et châtaignes d'eau[N 1]. Tandis que la chasse et la cueillette apportaient à cette économie de prédation l'essentiel des ressources alimentaires, on y a élevé aussi des porcs et des chiens : les seuls animaux d'élevage[4] .
L'analyse biochimique des résidus de tessons a révélé en 2003 la présence de marqueurs de trois boissons fermentées : bière à base de riz (ions d'oxalate de calcium dans des résidus), hydromel à base de miel (trace de cire), vin à base de fruit (aubépine et/ou raisin)[6].
Vestiges
modifierL'ensemble des restes d'objets impliqués dans une pratique de production agricole représente seulement 6,8 % de l'ensemble des objets façonnés et utilisés au début de l'installation et cette proportion s'élève à 53,4 % lors de la phase finale. Et tandis qu'une part importante de la population continuait à pratiquer chasse et collecte, la part du travail de production liée à la vie sédentaire n'a fait que croitre. La santé physique de la population a baissé ce qui semble indiquer une « pression sélective » introduite par la pratique agricole et la vie sédentaire[7].
Flutes
modifierPlusieurs flutes en os datant du VIIe millénaire av. J.-C. et comportant sept trous[8] ont été découvertes sur le site de Jiahu[9]. Elles ont un temps été considérées comme les plus anciens instruments à notes multiples connus. L'une d'elles comporte huit trous et peut jouer une gamme tonale actuelle[10].
Tortues
modifierLe site de Jiahu a livré des objets à fonction culturelle remarquables. Quelques tombes de la culture de Peiligang, lors de sa phase tardive, contenaient des carapaces de tortues perforées : 7 perforations dans la partie supérieure et plusieurs dans la partie inférieure conservée. D'autres portaient des marques incisées. Ce pourrait être des offrandes funéraires, typiques de la culture de Beixin-Dawenkou, située à l'est de celle de Peiligang[11]. Des carapaces identiques associées à environ 10 petits cailloux ont été déposées de chaque côté du défunt dans une tombe du site de Dawenkou. Certains ont interprété ces carapaces comme des « hochets » (ou crécelles)[7].
Les incisions trouvées à Jiahu sur des écailles de tortue ont été interprétées par certains archéologues chinois comme des signes[7]. Il ne s'agirait toutefois pas encore d'une véritable écriture. Les premières inscriptions sur os et écailles de tortue destinées à la divination datent de la fin de la dynastie Shang, vers [7],[1].
Notes et références
modifierNotes
modifier- Cuite immédiatement ou bien séchée, elle se conserve plus d'un an pour pouvoir être consommée ultérieurement.
Références
modifier- (en) Xueqin Li, Harbottle Garman, Juzhong Zhan et Changsui Wang, « The earliest writing ? Sign use in the seventh millennium BC at Jiahu, Henan Province, China », Antiquity, vol. 77, no 295, , p. 31-44
- (en) Juzhong Zhang, Garman Harbottle, Changsui Wang et Zhaochen Kong, « Oldest playable musical instruments found at Jiahu early Neolithic site in China », Nature, vol. 401, , p. 366-368 (lire en ligne, consulté le )
- Li Liu and Xingcan Chen 2012, p. 146
- Li Liu and Xingcan Chen 2012, p. 144
- Zhang Juzhong, Huanjing yu Peiligang wenhua, cité par David Keightley, « The Environment of Ancient China », in Loewe et Saughnessy, The Cambridge History of Ancient China, Cambridge University Press, 1999, p. 34
- (en) Patrick E. McGovern, Juzhong Zhang, Jigen Tang et col., « Fermented beverages of pre- and proto-historic China », Proceedings of the National Academy of Sciences, vol. 101, no 51, , p. 17593-17598 (DOI 10.1073/pnas.0407921102).
- Li Liu and Xingcan Chen 2012, p. 147
- Jeannette Werning et Corinne Debaine-Francfort 1991, p. 86-87
- Page du Metropolitan Museum of Art : Heilbrunn Timeline of Art History sur les flutes de Jiahu
- Juzhong Zhang, Xinghua Xiao et Yun Kuen Lee, « The early development of music. Analysis of the Jiahu bone flutes », Antiquity, 2004, vol. 78, no 302, p. 769-778
- Jeannette Werning et Corinne Debaine-Francfort 1991, p. 86-87 développe cette interférence entre des cultures dont la phase ultime de Peiligang pourrait avoir été contemporaine d'une des phases de Dawenkou.
Bibliographie
modifier- Jeannette Werning et Corinne Debaine-Francfort, Au long du fleuve Jaune : premiers villages, premiers vases du Henan : Musée départemental de préhistoire de Solutré, 21 juin - 15 octobre 1991, Solutré, Musée départemental de préhistoire, , 152 p.
- (en) Li Liu, The Chinese Neolithic : Trajectories to Early States, Cambridge et New York, Cambridge University Press, , 498 p. (ISBN 978-0-521-64432-7)
- (en) Li Liu et Xingcan Chen, The Archaeology of China : From the Late Paleolithic to the Early Bronze Age, Cambridge et New York, Cambridge University Press, , 330 p. (ISBN 978-0-521-81184-2)