Husseinites
Les Husseinites (arabe : حسينيون) sont une dynastie tunisienne qui est la dernière à régner sur son pays avant l'instauration du régime républicain.
Pays | Tunisie |
---|---|
Titres | Bey de Tunis |
Fondation |
Hussein Ier Bey |
Déposition |
(252 ans et 13 jours) Lamine Bey |
Instaurée le par Hussein Ben Ali[1] qui prend le titre de bey et possesseur du Royaume de Tunis, elle gouverne le pays jusqu'à la proclamation du régime républicain le , ce qui la place au deuxième rang dans la liste des dynasties, derrière celle des Hafsides, quant à la durée de maintien au pouvoir.
L'héritier du bey de Tunis porte le titre de bey du camp (bey al-mahalla) jusqu'à l'indépendance, où il prend le titre de prince héritier. Après la déchéance de la monarchie, il devient le chef de la maison royale.
Histoire
modifierAprès les disputes incessantes entre corsaires et janissaires pour influencer le gouvernement de la régence ottomane au cours du XVIIe siècle, Ben Ali s'impose en 1705 en tant que bey de Tunis et fonde la dynastie des Husseinites sous le nom d'Hussein Ier Bey.
Les historiens s'accordent à souligner l'indépendance de facto de la Tunisie sous la dynastie husseinites par rapport à l'Empire ottoman. Cette indépendance est notamment marquée par la substitution de l'arabe au turc dans les correspondances officielles à partir du règne de Hammouda Pacha (1782-1814) et la création d'un drapeau national sous le règne de Hussein II Bey (1824-1835)[2].
En 1735, Ali Ier Pacha prend le pouvoir en détrônant son oncle Hussein Bey qui sera tué par son petit-neveu Younès le [3]. En 1756, Ali Bey est renversé par les deux fils de son prédécesseur qui s'emparent de Tunis avec l'aide du bey de Constantine : Mohamed Rachid Bey (1756-1759) et Ali II Bey (1759-1782)[4].
La domination des Turcs d'Alger ne prend fin qu'en 1807 par une victoire des Tunisiens conduits par Hammouda Pacha[5]. Après l'élimination des janissaires, l'influence ottomane diminue encore en Tunisie si bien qu'en pratique les Husseinites gouvernent eux-mêmes le pays. Néanmoins, l'économie de la Tunisie est considérablement affaiblie par plusieurs épidémies de peste et de choléra ainsi que la destruction de la flotte corsaire par la France en 1827. Viennent ensuite les règnes de Mahmoud Bey (1814-1824), Hussein II Bey, Moustapha Bey (1835-1837) et Ahmed Ier Bey (1837-1855), fils de Moustapha, qui est l'un des beys les plus énergiques de la dynastie. Sous Mohammed Bey (1855-1859) et Sadok Bey (1859-1882), des réformes sont lancées afin de moderniser le pays mais celles-ci provoquent un fort endettement et une faillite de l'État tunisien. En 1869, le Royaume-Uni, la France et l'Italie prennent le contrôle financier de la Tunisie par l'intermédiaire d'une commission financière internationale supervisant le remboursement de la dette publique du pays[6]. Avec le Pacte fondamental, tous les privilèges sont abolis et tous les Tunisiens se voient conférer des droits civiques. Cependant, bien que cette loi soit confirmée en 1861 dans la première constitution du monde arabe, elle n'entre jamais en vigueur après les révoltes des tribus. Après que la France a accepté l'occupation de Chypre par le Royaume-Uni, elle se retrouve les mains libres en Tunisie, occupe le pays et impose à Sadok Bey, par le traité du Bardo signé le , la reconnaissance du protectorat français de Tunisie[7]. Dès lors, le pouvoir des souverains devient symbolique. Après la déclaration d'indépendance de la Tunisie en 1956, le dernier souverain, Lamine Bey, dirige provisoirement le Royaume de Tunisie sans toutefois changer officiellement de titre. Il est déposé le sous la pression du Premier ministre Habib Bourguiba. Les Husseinites sont également dépossédés de leurs biens avec la proclamation de la République[8]. À la mort de Lamine Bey, le , le prince héritier Hassine Bey (né en 1893 et décédé en 1969), troisième fils de Naceur Bey et frère cadet de Moncef Bey, prend la tête de la maison royale de Tunisie. Une fois ce dernier disparu, aucun des princes de la famille royale ne prétend plus au titre d'héritier mais les aînés continuent à se succéder à la tête de la dynastie. |
Beys
modifierNom | Portrait | Début du règne | Fin du règne | Bey(s) du camp | Notes |
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Hussein Ier Bey | 1705 | 1735 | Ali Bey (1706-1725), lui succède Mohamed Rachid Bey (1725-1735) |
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Ali Ier Pacha | 1735 | 1756 | Younès Bey | Neveu du précédent | |
Mohamed Rachid Bey | 1756 | 1759 | Ali Bey, lui succède | Fils de Hussein Ier ; cousin du précédent | |
Ali II Bey | 1759 | 1782 | Hammouda Bey (1777-1782), lui succède | Frère du précédent | |
Hammouda Pacha | 1782 | 1814 | Fils du précédent ; régent dès 1777 ; règne le plus long (32 ans) | ||
Osman Bey | 1814 | 1814 | Salih Bey (1814) | Demi-frère du précédent ; règne le plus court (3 mois) | |
Mahmoud Bey | 1814 | 1824 | Ismaël Bey (1815-1816) Hussein Bey (1816-1824), lui succède |
Fils aîné de Mohamed Rachid ; écarté du trône à l'âge d'un an par son oncle Ali II | |
Hussein II Bey | 1824 | 1835 | Moustapha Bey, lui succède | Fils du précédent | |
Moustapha Bey | 1835 | 1837 | Ahmed Bey, lui succède | Frère du précédent | |
Ahmed Ier Bey | 1837 | 1855 | Mohammed Bey, lui succède | Fils du précédent | |
Mohammed Bey | 1855 | 1859 | Sadok Bey, lui succède | Fils de Hussein II et cousin du précédent | |
Sadok Bey | 1859 | 1882 | Hammouda Bey (1859-1863) Ali Bey (1863-1882), lui succède |
Frère du précédent, sans postérité ; début du protectorat français (1881) | |
Ali III Bey | 1882 | 1902 | Tahib Bey (1882-1898) Hédi Bey (1898-1902), lui succède |
Frère du précédent | |
Hédi Bey | 1902 | 1906 | Naceur Bey, lui succède | Fils du précédent | |
Naceur Bey | 1906 | 1922 | Habib Bey, lui succède | Fils de Mohammed Bey et cousin du précédent | |
Habib Bey | 1922 | 1929 | Ismaël Bey (1922-1928) Ahmed Bey (1928-1929), lui succède |
Petit-fils de Mohammed Bey (son père n'a pas régné) et cousin du précédent | |
Ahmed II Bey | 1929 | 1942 | Adil Bey (1929-1939) Tahar Bey (1939-1941) Béchir Bey (1941-1942) Moncef Bey (1942), lui succède |
Fils d'Ali III et cousin du précédent | |
Moncef Bey | 1942 | 1943 | Lamine Bey, lui succède | Fils de Naceur Bey, destitué | |
Lamine Bey | 1943 | 1957 | Azzedine Bey (1943-1953) Essadok Bey (1953-1955) Hassine Bey (1955-1957) |
Fils de Habib Bey ; dernier bey de Tunis |
Chefs de la maison royale
modifierNom | À partir de | Jusqu'en | Notes |
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Lamine Bey (1881-1962) |
1957 | 1962 | Dernier bey de Tunis |
Hassine Bey (1883-1969) |
1962 | 1969 | Prince héritier |
Mustapha Bey (1883-1974) |
1969 | 1974 | |
Taïeb Bey (1902-1989) |
1974 | 1989 | |
Slimane Bey (1909-1992) |
1989 | 1992 | |
Allalah Bey (1910-2001) |
1992 | 2001 | |
Chedly Bey (1910-2004) |
2001 | 2004 | |
Moyhedine Bey (1911-2006) |
2004 | 2006 | |
Hammouda Bey (1928-2013) |
2006 | 2013 | |
Mohamed El Habib Bey[9] (1929-2023) |
2013 | 2023 |
Arbre généalogique
modifier- Ali Turki (?-av. )
- Mohamed (?-)
- Ali Ier (-), 1er bey du camp (-), bey de Tunis (-)
- Younès Bey (1715-av. ), bey du camp (-)
- Ali Ier (-), 1er bey du camp (-), bey de Tunis (-)
- Hussein Ier (1675-), bey de Tunis (-)
- Mohamed Rachid (1710-), bey du camp (-), bey de Tunis (-)
- Mahmoud (-), bey de Tunis (-)
- Hussein II (-), bey du camp (-), bey de Tunis (-)
- Mohamed (-), bey du camp (-), bey de Tunis (-)
- Hussein Bey (-)
- Saïd Bey (-)
- Mustapha Bey (-), chef de la maison beylicale (-)
- Saïd Bey (-)
- Naceur (-), bey du camp (-), bey de Tunis (-)
- Moncef (-1er sep. 1948), bey du camp (-), bey de Tunis (-)
- Hassine Bey (-), bey du camp (-), prince héritier (-), chef de la maison beylicale (-)
- Mohamed Bey (-)
- Hammouda Bey (-), chef de la maison beylicale (? -)
- Hussein Bey (-)
- Sadok (-), bey du camp (-), bey de Tunis (-)
- Hammouda Bey (1816-), bey du camp (-)
- Ali III (-), bey du camp (-), bey de Tunis (-)
- Moustapha Bey (-)
- Azzedine Bey (-), bey du camp (-)
- Slimane Bey (-), chef de la maison beylicale (-)
- Allalah Bey (-2001), chef de la maison beylicale (-2001)
- Moyhedine Bey (-? ), chef de la maison beylicale (-? )
- Essadok Bey (-), bey du camp (-)
- Azzedine Bey (-), bey du camp (-)
- Hédi (-), bey du camp (-), bey de Tunis (-)
- Tahar Bey (-), bey du camp (-)
- Béchir Bey (-), bey du camp (-)
- Ismaël Bey (-), bey du camp (-)
- Ahmed II (-), bey du camp (-), bey de Tunis (-)
- Taïeb Bey (-), chef de la maison beylicale (-)
- Moustapha Bey (-)
- Mimoune Bey (av. -)
- Tahib Bey (-), bey du camp (-)
- Adil Bey (av. -)
- Adil Bey (-), bey du camp (-)
- Mohamed (-), bey du camp (-), bey de Tunis (-)
- Moustapha (? -), bey du camp (-), bey de Tunis (-)
- Ahmed Ier (-), bey du camp (-), bey de Tunis (-)
- Hussein II (-), bey du camp (-), bey de Tunis (-)
- Ismaël Bey (?-), bey du camp (-)
- Mahmoud (-), bey de Tunis (-)
- Ali II (-), bey du camp (-), bey de Tunis (-)
- Hammouda Pacha (-), bey du camp (-), bey de Tunis (-)
- Osman (-), bey de Tunis (-)
- Salih Bey (1782-), bey du camp (-)
- Mohamed Rachid (1710-), bey du camp (-), bey de Tunis (-)
- Mohamed (?-)
Autres personnalités
modifier- Fayçal Bey (1955- ), biologiste, arrière-petit-fils de Lamine Bey ;
- Janina Bey (1960- ), artiste et couturière, arrière-petite-fille de Lamine Bey[10].
Notes et références
modifier- Nadia Sebaï, Mustafa Saheb Ettabaâ : un haut dignitaire beylical dans la Tunisie du XIXe siècle, Carthage, Cartaginoiseries, , 94 p. (ISBN 978-9973-704-04-7, lire en ligne), p. 11.
- Noureddine Sraieb, « Élite et société : l'invention de la Tunisie de l'état-dynastie à la nation moderne », dans Tunisie au présent : une modernité au-dessus de tout soupçon ?, Aix-en-Provence, Institut de recherches et d'études sur le monde arabe et musulman, coll. « Connaissance du monde arabe », (ISBN 978-2-271-08127-8, lire en ligne), p. 65–96.
- Azzedine Guellouz, Mongi Smida, Abdelkader Masmoudi et Ahmed Saadaoui, Histoire générale de la Tunisie, t. III : Les temps modernes, Tunis, Sud Éditions, , 495 p. (ISBN 978-9973-844-76-7), p. 217.
- Ibn Abi Dhiaf, Présent des hommes de notre temps : chroniques des rois de Tunis et du pacte fondamental, vol. II, Tunis, Maison tunisienne de l'édition, , p. 183-184.
- Arnoldo Soler et Caston Loth, Arnoldo Soler chargé d'affaires d'Espagne à Tunis et sa correspondance, Charleston, BiblioBazaar, , 100 p. (ISBN 978-0-554-70440-1), p. 41.
- Laurent Colantonio, Sophie Kerignard, Véronique Fau-Vincenti et Alice Primi, 100 fiches d'histoire du XIXe siècle, Paris, Bréal, , 334 p. (ISBN 978-2-7495-0340-0, lire en ligne), p. 276.
- (en) Nagendra Kumar Singh, International encyclopaedia of Islamic dynasties, New Delhi, Anmol Publications, , p. 1100.
- Samy Ghorbal, « Bourguiba proclame « sa » République », sur jeuneafrique.com, (consulté le ).
- (en) Christopher Buyers, « The Husainid Dynasty », sur royalark.net (consulté le ).
- « Janina Bey : il était une fois, une princesse tunisienne à Paris », sur babnet.net, (consulté le ).
Bibliographie
modifier- El Mokhtar Bey, De la dynastie husseinite : le fondateur Hussein Ben Ali, 1705 - 1735 - 1740, Tunis, Serviced, , 615 p.
- El Mokhtar Bey, Les beys de Tunis, 1705-1957 : hérédité, souveraineté, généalogie, Tunis, El Mokhtar Bey, , 296 p.
- Mohamed Ali Habachi, Princes et princesses husseinites : une autre histoire, Tunis, Sotumedia, , 230 p. (ISBN 978-9938918144).
- Mohamed Salah Mzali, L'hérédité dans la dynastie husseinite : évolution et violations, Tunis, Maison tunisienne de l'édition, , 80 p.
- Leïla Temime Blili, Les femmes de la maison houssaynîte, Tunis, Script, , 304 p. (ISBN 978-9973819154).
Liens externes
modifier
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :
- Noura Borsali, « Le tricentenaire de la dynastie husseinite est une date importante dans l'histoire de la Tunisie », sur espace-diversite83.fr (consulté le ).
- (en) Christopher Buyers, « The Husainid Dynasty », sur royalark.net (consulté le ).